Les Sujets Débats de Deskomp

Voici un ensemble de sujets sur le musique traditionnelle et la culture bretonne qui nous tiennent à coeur.
N'hésitez pas à nous faire part de vos commentaires dans le "Forum Deskomp".

Le 

04/05/2002

De 

Gaël

Forum Deskomp

       

Folklore, Folklo, Tradition... La valse des étiquettes

"FOLKLORE" : n.m. (angl. folk, peuple, et lore, science).

1. Ensemble des productions culturelles non matérielles (croyances, rites, contes, légendes, fêtes, cultes, etc.) des sociétés sans écriture ou paysannes.
2. Manifestation d'un pittoresque superficiel. ~ C'est du folklore : ça ne mérite pas d'être pris au sérieux. (1).


Ca partait plutôt bien, mais ça se gâte en cours de route. Nous sommes en présence d'un de ces fameux "glissements sémantiques" si nombreux en langue française. Voyons plus loin.


"FOLKLORIQUE" : adj.

1. Relatif au folklore. Danse folklorique.
2. Fam. Pittoresque mais dépourvu de sérieux. Personnage folklorique. (2).


On ne peut pas dire que ça s'arrange.

Et maintenant, la cerise sur le gâteau !...


"FOLKLO" : adj. inv. (abrév.). Fam.

Folklorique, qui ne peut être pris au sérieux. Des idées folklo. (3).


Inutile de poursuivre, la démonstration est assez claire (même si le sens déviant des termes a été supprimé dans le dictionnaire encyclopédique 1994 de monsieur Larousse).
Malgré les efforts de certains pour conserver au terme son sens premier, folklore est devenu, au fil du temps "synonyme de gentillesse, de naïveté bon-enfant, de sous-développement artistique, de nostalgie pastorale, de veillées des chaumières, de retardement intra-veineux et, en tout état de cause, de facilité, de confusion et de pagaille" (4), comme l'a écrit Per Jakez HELIAS.

Qui, un jour ou l'autre, n'a pas qualifié une situation grotesque, un personnage ringard ou, simplement, quelque chose de risible d'un lapidaire "c'est folklorique !" (variante : "c'est folklo !") ? Malgré tout, il s'en trouve encore qui semblent ignorer la dérive du terme; et d'adhérer à une " fédération nationale du folklore français", ou d'organiser un "festival mondial du folklore". Ce qui ne fait que renforcer la confusion.
Dans sa langue mère, l' anglais, le mot folklore n'a pas connu pareille déchéance. Allez savoir pourquoi ?

Alors, de nos jours où toute chose se doit d'avoir une étiquette bien lisible, ne serait ce que pour avoir sa place dans les rayonnages des hypermarchés, comment nommer cette survivance des us et coutumes paysannes et populaires ? On a pensé, un temps, avoir trouvé la parade en lui substituant le mot "tradition".
Hélas, mot passe-partout, il se prête de fait à toute sorte d'utilisation ; on l'entend, presque systématiquement et de plus en plus, en lieu et place de "classique", "habituel" (entendu ou lu dans les médias : lessive traditionnelle, partis politiques traditionnels, traditionnels bouchons du 15 août - Ha, quelle belle tradition !).

Bien sûr, comme celui qu'il est censé remplacer, on l'oppose à "modernité", à "nouveauté".
La formule "tradition et modernité" commence à être usée, à force de servir à chaque fois qu'il faut faire comprendre à un interlocuteur que de jouer de la cornemuse, ou parler une langue régionale n'est en rien un démarche passéiste.

Pire encore, les fascistes récupèrent le terme et tout ce qu'il peut recouvrir pour légitimer leur idéologie exclusiviste. Obsédés par le concept de pureté originelle, eux opposent "tradition" à "métissage", mettant ainsi tout le monde d'accord sur un point - et notamment les extrémistes de l'autre bord - : les folkeux nostalgiques de la paille dans les sabots ont une hideuse face cachée, mélange de repli communautaire et de xénophobie.

On a beau rajouter des adjectifs positifs ("tradition vivante", voire "tradition vibrante"), ça ne fait qu'entériner le fait que, pour la majorité des gens, la tradition est figée dans le passé, ce qui n'est pas une qualité pour la société actuelle qui vit dans le présent. Or, une tradition ne se fige que lorsqu'elle meurt. Elle meurt parce qu'elle n'a pas pu se renouveler. Et bien des traditions seraient effectivement mortes si on écoutait ceux qui ne leur prêtent aucune faculté d'adaptation. Exemple : "Quoi ? Vous ne dansez pas en sabots dans les faistenauzes ?!", ou bien : " Du breton sur Internet ? Mais ca ne s'écrit pas !!", ou encore: "Un groupe de musique bretonne avec de la guitare ? Ah non. La vraie musique bretonne, c'est le biniou… D'ailleurs, je trouve ça affreux !".

1. 2.et 3. Petit Larousse illustré, 1989. 4. P.J.HELIAS, Le Cheval d'Orgueil/Marc'h al Lorc'h, coll. Terre Humaine, ed. Plon, 1975.


 

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